Evangelium Vitae - L'Evangile de la vie (2ème partie)

De Ebior
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Dans notre dernier numéro d'AFALE MAGAZINE, je vous promettais de revenir sur l'encyclique de Jean Paul II. Je tiens parole dès aujourd'hui. Ce document est, en effet, de la plus haute importance.

J'espère que vous l'avez déjà acheté et lu. Gardez-le à la portée de la main. Vous aurez beaucoup d'occasion d'y puiser conseils et réconfort pour votre apostolat missionnaire.

Je crois que c'est le sociologue Henri MENDRAS qui observait que sa bibliothèque était remplie d'ouvrages dont on avait parlé peut-être durant cinq ou six semaines à leur parution, puis que l'on s'était empressé d'oublier. Il n'en restait rien dans l'esprit de nos contemporains. Il s'agissait cependant d'études de qualité !

Autre exemple : l'éditeur du livre de Jean Paul SARTRE "L'ETRE ET LE NEANT" ne s'est aperçu qu'après plusieurs mois que l'imprimeur avait commis une "bourde magistrale". Le premier chapitre était reproduit deux fois. Le deuxième, par contre, faisait défaut. L'ouvrage était présenté comme un grand succès de librairie. C'était le temps où le "pape" de l'existentialisme régnait sur St Germain des Prés, où sa "philosophie de garçon de café", (pour reprendre l'expression de LEVINAS) sévissait partout. Or, vingt-huit personnes seulement s'étaient manifestées pour signaler l'erreur et protester. Conclusion: l'auteur n'avait eu que vingt-huit lecteurs effectifs.

Il en sera naturellement tout autrement pour EVANGELlUM VITAE qui restera un texte de référence et marquera notre époque !

Pour vous aider à en apprécier toute la substance, je vous propose d'axer nos réflexions sur quatre points :

  1. La tonalité dominante de l'Encyclique,
  2. nos raisons personnelles à l'AFALE d'exprimer notre joie,
  3. le constat que tous les reproches avancés par certains ne sont aucunement fondés,
  4. un lexique (un peu à l'école de ce qu'a fait le Cardinal Poupard pour les différents textes du Pape dans : "DIX REPERES POUR L'AN 2000" , Desclée de Brouwer) des problèmes de sociétés traités par Jean Paul II dans "EVANGELIUM VITAE" avec les références correspondantes.

1. La tonalité dominante de "L'EVANGILE DE LA VIE"

Je sous-titrais mon précédent article, citant Irénée de Lyon : "La Gloire de Dieu, c'est l'homme vivant". J'ai fait mouche puisque vous avez été nombreux à réagir.

Le Saint Père rappelle à plusieurs reprises cette phrase de Saint Irénée, spécialement au chapitre IX, intitulé : "Je suis venu pour qu'ils aient la vie! "

Il développe sa pensée au § 34 :

"A l'homme est conféré une très haute dignité dont les racines plongent dans le lien intime qui l'unit à son créateur, en l'homme resplendit un reflet de la réalité même de Dieu" (cf. "Faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance", Gn 1 26).

La vie que Dieu offre à l'homme est un don par lequel Il fait participer sa créature à quelque chose de Lui-même. II en a fait une image de sa propre nature" (Sg 2 23).

"La vie de l'homme vient de Dieu, c'est son don, son image, et son empreinte, la participation à son souffle vital. Dieu est l'unique Seigneur de cette vie, l'homme ne peut en disposer". § 39

 "La vie humaine étant sacrée. elle est dotée d'une inviolabilité inscrite depuis les origines dans le cœur de l'homme, dans sa conscience" § 40. Lorsque Jésus parle de vie éternelle, cette qualification ne renvoie pas seulement à une perspective supra-temporelle, "Eternelle" est la vie promise et donnée par Jésus, parce qu'elle est plénitude de participation à la vie de l'ETERNEL". Quiconque croit en Jésus et entre en communion avec lui a la vie éternelle". § 37

"La vie éternelle est don de la vie même de Dieu, ainsi que la vie de fils de Dieu". § 38

Ce qui autorise Jean Paul II à annoncer le thème central de l'encyclique, dès son introduction :

"L'homme est appelé à une plénitude de vie qui va bien au-delà de son existence sur terre, puisqu'elle est participation à la vie même de Dieu". § 2.

et plus loin de préciser :

"C'est à ce niveau que se situe la valeur et l'inviolabilité, insignes de la vie humaine. Oui, Dieu a créé l'homme pour l'incorruptibilité !" § 34

Mais revenons à la pensée de St IRÉNÉE et citons intégralement sa phrase :

"La Gloire de Dieu, c'est l'homme vivant, la Gloire de l'homme, c'est de voir Dieu", ce que Mgr DEFOIS traduit par : "L'homme vit quand il voit Dieu" (en fait quand il accepte Dieu, adhère à son Alliance et se conforme à ses commandements).

"Quand, poursuit Mgr DEFOIS, il ne reconnaît pas Dieu comme Dieu, l'homme trahit sa vocation et sa dignité, (car) il ne saurait être réduit à l'expression de soi et à des relations horizontales. Il est le lieu de la manifestation de Dieu dans le monde. Dieu est l'Unique Seigneur de la vie".

Qu'as-tu fait ? (Gn 4, 10)

"Ce merveilleux projet de Dieu a malheureusement été contrarié par l'irruption du péché dans l'histoire. Par le péché, l'homme se rebelle contre son Créateur. Ainsi, l'être humain ne se contente pas de souiller en lui-même l'image de Dieu, mais il est tenté de l'offenser aussi chez les autres, en substituant aux rapports de communion, des attitudes de défiance, d'indifférence, d'inimitié, jusqu'à la haine homicide. Quand on ne reconnaît pas Dieu comme Dieu, on trahit le sens profond de l'homme et on porte atteinte à la communion entre les hommes". § 36

"Le frère tue le frère. Comme dans le premier fratricide, dans tout homicide est violée la parenté "spirituelle" qui réunit les hommes en une seule famille.Il n'est pas rare que soit violée cette parenté "de chair et de sang", par exemple lorsque les menaces contre la vie se développent dans les rapports entre parents et enfants, c'est le cas de l'avortement et celui de l'euthanasie favorisés ou provoqués. § 8

"Et comment ne pas évoquer la violence faite à la vie de millions d'êtres humains, spécialement d'enfants victimes de la misère, de la malnutrition et de la famine, à cause d'une distribution injuste des richesses entre les peuples et entre les classes sociales. Ou la propagation des germes de mort qui s'opère par la dégradation inconsidérée des équilibres écologiques, par la diffusion criminelle de la drogue ou par l'encouragement donné à des types de comportements sexuels qui, outre le fait qu'ils sont moralement inacceptables, laissent présager de graves dangers pour la vie". § 10 (le sida par exemple).

II Nos raisons personnelles d'exprimer notre joie

A Le Primat de la Parole

Jean Paul II assoit constamment son enseignement sur des références scripturaires précises. Il s'appuie toujours sur la Parole même de Dieu, (A.T. et N.T.), et nous fournit les références bibliques correspondantes.

En fait, il entend actualiser pour notre temps l'historicité de l'Alliance de Dieu avec les hommes, et la Bonne Nouvelle du salut proclamée par Jésus Christ.

"C'est l'ensemble de la Loi qui sauvegarde pleinement la vie de l'homme". "L'homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout ce qui sort de la bouche de Dieu" en Dt 8 3 et Mt 4 4.

"C'est en écoutant la Parole du Seigneur que l'homme peut vivre en toute dignité et justice. C'est en observant la Loi de Dieu que l'homme peut porter des fruits de vie et de bonheur. "Quiconque la garde vivra. Quiconque l'abandonne mourra" (Ba 4, 1).

"La vérité de la vie est révélée par le commandement de Dieu." § 48

B - Le rôle privilégié de la famille

L'acte de procréation :

Le Pape rappelle que le Concile Vatican II parle d'une "participation spéciale de l'homme et de la femme à "l'œuvre créatrice" de Dieu" ce qu'il a lui-même exprimé dans sa LETTRE AUX FAMILLES par "quand de l'union conjugale naît un nouvel homme, Il apporte avec lui au monde une image et une ressemblance particulières (nouvelles) avec Dieu lui-même".

Les époux, en tant que parents, sont des coopérateurs de Dieu Créateur dans la conception et la génération d'un nouvel être humain. Dieu Lui-même est présent. En effet, c'est de Dieu seul que peut provenir cette "image", cette "ressemblance" qui est propre de l'être humain, comme cela s'est produit dans la création. La génération est la continuation de la création" § 43.

D'où le rôle insigne de coopération de la famille dans la réalisation du projet divin. "A l'intérieur du "peuple de la vie et pour la vie", la responsabilité de la famille est déterminante. Dans la famille, chacun est reconnu, respecté, honoré parce qu'il est une personne et si quelqu'un a davantage de besoins, l'attention et les soins qui lui sont portés se font plus intenses".

"Comme Eglise domestique, la famille a vocation d'annoncer, de célébrer et servir l'Evangile de la vie. C'est une mission qui concerne avant tout les époux, appelés à transmettre la vie, en se fondant sur une conscience sans cesse renouvelée du sens de la génération, en tant qu'événement privilégié dans lequel s'est manifesté le fait que la vie humaine est un don reçu pour être à son tour donné.

C'est surtout par l'éducation des enfants que la famille remplit sa mission d'annoncer l'Evangile de la vie. Par la parole et par l'exemple, dans les rapports et les choix quotidiens et par leurs gestes et leurs signes concrets, les parents initient leurs enfants à la liberté authentique. L'action éducative des parents chrétiens doit servir la foi des enfants et les aider à répondre à la vocation qu'ils reçoivent de Dieu. § 92

"En outre, la famille célèbre l'Evangile de la vie par la prière quotidienne, personnelle et familiale, dans la prière, elle loue et remercie le Seigneur pour le don de la vie, et elle invoque lumière et force pour affronter les moments de difficulté et de souffrance, sans jamais perdre l'espérance.

"L'amour paternel et maternel véritable sait aller au-delà des liens de la chair et du sang et accueillir aussi des enfants d'autres familles.

Enfin, et cette recommandation nous interpelle spécialement :

"Le service de l'Evangile suppose que les familles, spécialement par leur participation à des associations, s'emploient à obtenir que les lois et les institutions de l'état ne lèsent en aucune façon le droit à la vie, de la conception à la mort naturelle, mais le défendent et le soutiennent"

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Auteur : Louis LUCROT

Paru dans l'AFALE Magazine, n° 203, avril 1995