Textes païens grecs et latins
Témoignages directs sur le Christ et/ou sur les chrétiens
TACITE (Publius Cornelius Tacitus)
Né en 52/54 après Jésus-Christ,cet historien romain rédigea son oeuvre les Annales alors qu'il était gouverneur de la province d'Asie en 112. Dans sa description du règne de Néron et plus particulièrement de l'incendie qui dévasta Rome plusieurs jours en juillet 64, on trouve cette remarque
" Pour étouffer cette rumeur (=que l'empereur avait provoqué l'incendie), Néron produisit comme inculpés et livra aux tourments les plus raffinés des gens, détestés pour leurs turpitudes, que la foule appelait chrétiens. Ce nom leur vient de Christ que, sous le principat de Tibère, le procurateur Ponce Pilate avait livré au supplice: réprimée sur le moment, cette exécrable superstition faisait de nouveau irruption, non seulement en Judée, berceau du mal, mais encore à Rome, où tout ce qu'il y a d'affreux et de honteux dans le monde converge et se répand..(Annales, XV, 44). "
Tout comme Luc, Tacite met en parallèle l'empereur Tibère et le gouverneur Ponce-Pilate. Ce texte a parfois été considéré , sans raison valable, comme interpolé parce qu'il n'est pas cité par les Pères de l'Église.
SUETONE ( Caius Suetonius Tranquillus )
Haut fonctionnaire aux archives impériales sous Hadrien en 119 après Jésus-Christ il est l'auteur de biographies minutieuses des empereurs, la Vie des Douze Césars
"Comme les Juifs se soulevaient continuellement, à l'instigation de Chrestus, il les expulsa de Rome (Vie de Claude 25,4). "
Chrestos est une autre orthographe pour Christ dont il n'est pas dit qu'il vivait à cette époque, l'expression étant fort neutre. Il s'agit de l'empereur Claude, en l'année 49 (voir Act. 18,2 où un couple juif, Aquila et Priscilla avait été obligé de quitter Rome à cause d'un édit de Claude).
A propos de l'incendie de Rome sous Néron, Suétone fait l'observation suivante (cf. le texte de Tacite)
"Néron livra aux supplices les chrétiens, sorte de gens adonnés à une superstition nouvelle et dangereuse (Vie de Césars, 26, 2) ".
PLINE LE JEUNE (Caius Plinius Secundus)
Gouverneur de la province de Bithynie en 112 après JC, il écrit cette à l'empereur Trajan pour lui demander conseil sur la manière de traiter les chrétiens. c'est un texte important mentionnant à la fois le Christ et les chrétiens
Ceux qui niaient être chrétiens ou l'avoir été, s'ils invoquaient les dieux (...) et offraient en sacrifice de l'encens et du vin devant ton image (...) ; si, de plus, ils blasphémaient Christ, toutes choses à quoi on ne peut jamais contraindre ceux qui sont vraiment chrétiens, j'ai pensé qu'il convenait de les relâcher.(...)
D'ailleurs (les chrétiens interrogés) affirmaient que toute leur faute, ou leur erreur, s'était bornée à avoir l'habitude de se réunir à jour fixe (= le dimanche) avant le lever du soleil, de chanter entre eux alternativement un hymne à Christ comme à un dieu, de s'engager par serment (= sacrement du baptême), non pas à perpétrer quelque crime, mais à ne commettre ni vol, ni brigandage, ni adultère, à ne pas manquer à la parole donnée, à ne pas nier un dépôt réclamé en justice (= les dix commandements). Ces rites accomplis, ils avaient coutume de se séparer et de se réunir encore pour prendre leur nourriture qui, quoi qu'on dise, est ordinaire et innocente (= l'Eucharistie ); même cette pratique, ils y avaient renoncé après mon édit par lequel j'avais, selon tes instructions, interdit les hétairies (= des associations qui pouvaient prendre aussi une tournure politique ... ). J'ai cru d'autant plus nécessaire de soutirer la vérité à deux esclaves que l'on disait diaconesses (" ministrae"), quitte à les soumettre à la torture. Je n'ai trouvé qu'une superstition déraisonnable et sans mesure. Aussi ai-je suspendu l'information, pour recourir à ton avis. L'affaire m'a paru mériter que je prenne ton avis, surtout à cause du nombre des accusés; il y a une foule de personnes de tout âge, de toute condition, des deux sexes aussi, qui sont ou seront mises en péril. Ce n'est pas seulement à travers les villes, mais aussi à travers les villages et les campagnes que s'est répandue la contagion de cette superstition; je crois pourtant qu'il est possible de l'enrayer et de la guérir..(Livre X,lettre 96) "
Ces trois auteurs romains du début du deuxième siècle ont donc entendu parler d'un certain Christ ( le nom de Jésus n'est jamais utilisé ), supplicié par le gouverneur Ponce-Pilate sous Tibère, dont la personne provoque des émeutes à Rome sous Claude et qui est adoré comme un dieu sous Trajan. Ces diverses affirmations qui proviennent de païens , hostiles aux chrétiens mais sans animosité particulière, correspondent à ce que nous apprennent les sources chrétiennes.
Remarquons aussi que Suétone parle de juifs sous Claude (41-54) et de chrétiens sous Néron (54-68) : la distinction s'est faite progressivement aux yeux des païens.